Appareil Fuji GX617, objectif W300mm f8.0, Film Provia 100F, Trépied carbone Gitzo, Expostion 4s f45 1/3
Reliant la Garonne à la mer Méditerranée, le canal du Midi emprunte le plus souvent la ligne droite sur les 241 km qu’il parcourt. Mais les aléas de la géographie l’obligent parfois à des détours. Et c’est précisément un S resserré qui siérait à mon format panoramique.
Tout commence par l’étude des cartes IGN. Impossible, vu le niveau de précision, d’en repérer sur les tracés. Mais cela me permet d’isoler 3 secteurs où le relief semble avoir mené la vie dure au chantier de construction. Mes deux premiers voyages me font ainsi parcourir à pied et dans les deux sens les chemins de halage. Passer plusieurs jours en repérage dans notre 21e siècle voué à la rentabilité peut étonner. Mais j’inscris mes photographies comme des quêtes pouvant nécessiter plusieurs années à leur réalisation. Mon plaisir est avant tout en chemin.
Lors d’un troisième voyage me faisant passer non loin du canal, je décide donc d’explorer un autre tronçon. Une surprise m’attend à l’endroit où je le rejoins, deux S consécutifs placés selon un axe perpendiculaire à la direction où le soleil se couche. Lors de mes précédentes recherches, les trois S déjà repérés n’étaient pas bien orientés ou n’avaient pas de belles allées de platanes de part et d’autre. Enfin toutes les conditions réunies. Du moins presque. Car le ciel est couvert et les nuages à l’horizon risquent de ne pas permettre au soleil couchant d’éclairer la voûte des arbres par en dessous.
C’est la raison pour laquelle la direction du méandre est importante. Idéalement j’ai besoin d’une lumière rasante et douce, diminuant le contraste provoqué par ces grands parasols naturels. Ne jamais se décourager. Je cherche longtemps le cadrage idéal, je prépare tout, et je me tiens prêt pour les 15 dernières minutes de jour. Il n’y aura que 10s d’éclairage, le temps de faire 1 seule photo. Je n’aurai la certitude d’avoir réussi que plusieurs semaines plus tard en examinant la diapositive.
Pour restituer ce site tout en profondeur avec ce double S, il m’a donc fallu choisir une lumière non seulement appropriée, mais aussi compatible avec les capacités de reproduction du film diapositif. L’appareil a été posé à ras le sol afin que la voûte formée par les branches de platanes ne cache pas l’extrémité visible du canal. L’absence totale de vent a permis un reflet parfait dans l’eau. Les couleurs du soir ont amené de la chaleur à la composition. Ces facteurs et d’autres ont été réfléchis afin de reproduire l’impression que l’on garde d’une promenade le long du canal. Pour plaire, l’image doit être construite comme un condensé des souvenirs tel que le cerveau les rapporte en les compilant et en les améliorant.